La fourmi du Sahara retrouve son chemin grâce à une bonne vue et aux cils de ses pattes


Un chercheur de l'Université de Zurich, Rüdiger Wehner, va recevoir le Prix Marcel Benoist pour ses travaux sur l'orientation des Cataglyphis, ces fourmis thermophiles capables de retrouver leur chemin au milieu du Sahara.

Le réchauffement climatique n'inquiète pas beaucoup la fourmi Cataglyphis. Indifférente à la chaleur, elle se balade sur ses longues jambes en plein midi au milieu du Sahara. «Aucune autre forme de vie ne fait ça dans le désert», lance, admiratif, Rüdiger Wehner. Directeur de l'Institut de zoologie de l'Université de Zurich, le professeur Wehner étudie depuis plus de trente ans le comportement des fourmis thermophiles Cataglyphis. Son travail lui vaut de recevoir, le 8 novembre prochain, le Prix Marcel Benoist 2002, d'un montant de 100 000 francs.

Ce n'est pas sans raison que la fourmi Cataglyphis – ou fourmi du désert – s'active pendant la journée, alors que la chaleur peut faire monter sa température corporelle jusqu'à 53°C. «A l'échelle des insectes, elle joue le rôle d'un charognard, explique le chercheur. Elle se nourrit des autres insectes qui, actifs la nuit, ne sont pas parvenus à regagner assez vite leur abri diurne et sont morts de chaud.» Pour trouver sa pitance, Cataglyphis suit un chemin tortueux dans le désert. En revanche, au retour, elle emprunte le chemin le plus direct pour regagner son nid. L'équipe d'éthologues zurichois s'est penchée sur les mécanismes visuels qui constituent le système d'orientation de cette fourmi. «Le cerveau d'une Cataglyphis ne pèse qu'un dixième de milligramme, remarque Rüdiger Wehner. Un pour cent seulement de ce minuscule cerveau est consacré à la navigation. C'est un excellent matériau d'étude: les solutions adoptées par un aussi petit cockpit ne peuvent pas être très compliquées. Et les données tirées de l'étude de son système neurologique peuvent être appliquées à d'autres animaux. Car un influx nerveux produit par un insecte n'est en rien différent d'un influx nerveux de mammifère, par exemple.»

Les chercheurs ont ainsi trouvé que la fourmi se base sur la lumière polarisée du ciel pour trouver la direction du nid. La lumière du ciel est en effet dispersée par les particules de l'atmosphère et acquiert une orientation ou, autrement dit, une «polarisation», invisible pour l'œil humain.

Mais comment une minuscule fourmi est-elle capable d'estimer une distance précise en plein Sahara? «Grâce aux minuscules poils présents aux articulations entre ses jambes et son corps», suggère Rüdiger Wehner. Ces organes sensoriels permettent dans un premier temps à la fourmi de «compter» le nombre de pas qu'elle fait. Si cette tactique fonctionne très bien en terrain plat, elle se révèle par contre inappropriée dans un environnement mouvant et irrégulier, comme le sable du Sahara. Le cerveau de l'insecte adopte alors instantanément une autre méthode.

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